Psychédélisme

De tous les genres musicaux consanguins du rock, le psychédélisme est l'un des rares à n'avoir jamais disparu des radars. Sans cesse renouvelé, réinjecté à l'intérieur d'autres courants, repensé au moyen de nouveaux outils, trimballé d'un bout à l'autre de la planisphère, il ressemble depuis sa première montée d'acide au milieu des années 1960 à une sorte de long trip dont on ne verrait jamais la fin. Et c'est tant mieux. Car le psychédélisme n'est pas en soi un genre de musique, mais plutôt une boîte de Pandore accouplée à une lanterne magique, un hybride multisensoriel destiné à inventer des illusions, à rendre la musique "bigger than life". Tout ou presque, dans l'idée originelle du psychédélisme, induit cette notion d'un dépassement des principes cartésiens, et en cela il est l'enfant du surréalisme plongé dans le bain à remous de la contre-culture des années 1960. Les deux ouvrages-clés qui ont inspiré les principales formules magiques autour desquelles la plupart des groupes ont bâti leurs univers parlent ainsi d'une traversée. Les Portes de la perception d'Aldous Huxley, publié en 1954, initiera toute une génération aux expériences hallucinogènes et inspirera son nom à une formation emblématique du psychédélisme américain, The Doors. Bien plus ancien mais tout aussi propice aux échappatoires, Alice au pays des merveilles de Lewis Carroll aura constitué une véritable mine d'or pour tous ceux qui,notamment en Angleterre, avaient pour désir de "traverser le miroir" : dérégulation du temps et de l'espace, bestiaire ensorcelé, croisement des songes et de la réalité, de la candeur enfantine et du rationalisme adulte.